Résumé
Un film réalisé en deux parties, l’une sur les peintures et eaux-fortes de 'La fête de Saint-Isidore' de Goya, l’autre sur sa série de gravures des 'Désastres de la guerre', autour du martyre du peuple espagnol soumis à l'invasion napoléonienne. Sans commentaire, mais porté par la musique du guitariste Andrès Segovia, le film met en miroir la joie des fêtes populaires et les horreurs de la guerre.
Avis
Les Désastres de la guerre' est une série de quatre-vingt-deux gravures réalisées entre 1810 et 1815 par le peintre et graveur espagnol Francisco de Goya (1746–1828). Il raconte le martyre du peuple espagnol lors de l’invasion napoléonienne. Les fêtes populaires comme celle de Saint Isidore sont souvent évoquées dans les œuvres de Goya : 'La fête de Saint-Isidore' (1788) mais aussi 'Le pantin' ou 'L’enterrement de la sardine', ainsi que des eaux-fortes ou des cartons destinés à réaliser des tapisseries. Ces œuvres témoignent de l’importance de ces fêtes populaires dans la culture espagnole à l’époque de Goya.
Alors qu’il effectuait le mixage de son premier long-métrage, 'Dimanche d’août' (produit par le grand scénariste du néo-réalisme Sergio Amidei), Luciano Emmer enregistra Andrès Segovia jouant à la guitare des œuvres de Torroba, Albeniz et Tarrega. Le musicien lui offrit ces enregistrements à condition qu’il les gardât dans leur intégralité. C’est à partir de ce matériel qu’allait se construire le film sur Goya (en réalité deux films de neuf minutes mis bout à bout : l’un sur les peintures et eaux-fortes de 'La fête de Saint-Isidore', l’autre sur les gravures des 'Désastres de la guerre'). Le film ne comprend aucun commentaire, toute la compréhension se faisant par immersion dans les œuvres. La musique crée une proximité et accentue l’émotion émanant des représentations de Goya, déjà si contrastées, entre les moments de joie et de liesse populaire de la fête de Sainte-Isidore et le sombre témoignage des malheurs de la guerre, aux traits plus brefs et tourmentés.
Luciano Emmer crée une composition dramatique grâce aux choix de cadres, aux mouvements de caméra et au montage, qui fait de "son" Goya l’un des sommets de ses films sur l’art. On pénètre dans l’œuvre de Goya par la seule évocation de ses représentations : cela suffit à faire ressortir le caractère, les techniques et la virtuosité du peintre. La peinture et la gravure nous sont alors données presque naturellement, sans approche savante ni historique, avec ce surcroît d’intérêt que nous donne cette familiarité.