Résumé
En filmant des châteaux de sable, Marc Hérouet raconte l'histoire de trois villes assiégées, à différentes époques, à travers les récits de trois enfants qui les habitent et voient leur monde s'écrouler.
Avis
Sur une image fixe, au bord d’une mer inconnue, défilent les noms de villes du monde entier. Leur point commun ? Elles ont connu un état de siège dans un passé lointain (Constantinople) ou récent (Gaza). Trois noms se détachent : Massada, Münster et Tenochtitlan, trois sièges qui nous seront racontés à travers les récits personnels de trois enfants, voix de l’innocence qui redonnent vie aux épisodes tragiques du passé, et font écho à un présent que l’on ne peut ignorer. David a onze ans et il a peur. À l’extrémité occidentale du désert de Judée, se dresse Massada que le gouverneur romain Flavius Silva et sa légion ont décidé d’assiéger. Le peuple juif, conduit par Eleazar Ben Yaïr, ne se rendra pas vivant et ce sont les corps d’hommes, de femmes et d’enfants que les Romains découvriront en entrant dans la ville. Marieke, fille de l’anabaptiste Jan Matthijs, vit avec sa famille dans la jolie ville de Münster, proclamée nouvelle Jérusalem. Églises et monastères ont été dévastés afin d’expurger les traces des catholiques. Chassé de la ville, l’évêque Franz von Waldeck est bien déterminé à la reprendre. Épuisé par un siège qui va durer une année, Münster tombe en 1535. Xaltemoc vit à Tenochtitlán. Cortès vient de trouver une nouvelle stratégie pour soumettre la ville : mettre en échec les Aztèques par la famine en interceptant toutes les petites embarcations qui apportent les vivres aux habitants. Cette idée, combinée avec l’épidémie de variole, se révèle efficace. La cité cède sous les assauts répétés du conquistador espagnol et de ses troupes après trois mois de siège, signifiant l’écroulement de l’empire Aztèque. Marc Hérouet, comme un enfant qu’il est encore sans doute, entremêle ces trois récits en trois langue (hébreu, néerlandais et nahuatl) d’un réalisme terrible avec, pour seul support visuel, des châteaux de sable, symboles même d’innocence, de rêve, mais surtout de fragilité. Ces citadelles nées de l’imagination enfantine, peuplées de chemins de ronde, de remparts, de cours et d’arrière-cours tels des monuments grandioses sur une plage abandonnée constituent donc les décors allégoriques de ces tragédies. Sans l’ombre d’un être humain, si ce n’est par la présence des voix, se matérialisent, sous nos yeux, les scènes de crimes atroces. La caméra transforme le sable, matière fluide, en sculptures monumentales et observe, tranquillement, la terrible puissance des éléments qui viennent les détruire, irrévocablement. Et l’univers se découvre, fragile devant l’impact violent du monde.