Résumé
À Barjac, immense terrain d'expérimentation, Anselm Kieffer se montre au travail, dans ses obsessions quotidiennes ou en discussion avec le critique Klaus Dermutz. Portrait d'un artiste autant que d'un lieu qui témoigne de sa quête démiurgique.
Avis
Version courte du long métrage présenté à Cannes en 2010 'Over Your Cities Grass Will Grow', 'Anselm Kiefer : l’artiste à l’œuvre' filme attentivement l'artiste dans son travail quotidien - juste avant qu’il ne quitte l’immense propriété de Barjac qu’il occupe pour son nouvel atelier à Paris. Anselm Kiefer incarne et embrasse peu à peu cette figure romantique et archaïque de l’artiste, celui qui tutoie les Dieux et nous les fait voir. Entre ses engins de chantier, ses contremaîtres, ses toiles immenses, il se dresse comme un véritable démiurge qui travaille au lance-flamme, casse d’immenses vitres, guide des grues... Et s’amuse comme un enfant à détruire ses jouets gigantesques. Contrepoint immobile de son travail, le dialogue entre Kiefer et le critique d’art allemand Klaus Dermutz, ponctue le film d’explications et de réflexions, de ses quêtes et de ses obsessions. Enfin, Sophie Fiennes promène sa caméra dans les tunnels creusés par Kiefer, elle fraie son chemin dans les ateliers, elle s’ouvre des voies dans la propriété où elle saisit les œuvres dans l’épaisseur du temps, la lumière naturelle, leur environnement, telles que les a installées Kiefer, entre des branches, du ciel bleu et des herbes folles. Elle assume des partis pris esthétiques très forts : cadrages larges, vastes mouvements de caméra, grandes plongées ou travelling doux et lents baignant dans la musique stridente et envoûtante de György Ligeti. En apesanteur, le film fabrique des images oniriques et improbables, un monde apocalyptique, un no man’s land qui rejoue l’enjeu à l’œuvre chez Kiefer.