Résumé
Claes Oldenburg s'est imposé comme l'un des représentants du happening aux États-Unis. Reconstitution d'une performance, le film de Roy Fridge permet de saisir la pensée artistique et politique à l'œuvre dans ce moment conçu justement pour ne pas laisser de traces.
Avis
D’après un happening de Claes Oldenburg de 1962.
Le happening est une manifestation collective née à New York qu’on pourrait définir comme "un spectacle de synthèse, un déroulement d’une action complexe gestuelle, sonore, lumineuse, mécanique, humaine, animale dans un cadre, un décor et selon un scénario plus ou moins vague." C’est avant tout un mécanisme de communication qui est devenu, pour un temps, le signe de ralliement et de reconnaissance d’une génération. Les auteurs du happening sont avant tout des peintres et Claes Oldenburg s’est imposé rapidement parmi les protagonistes du genre comme le réalisateur le plus doué, mais il préfère à ce terme celui de performance qui met l’accent sur le coefficient humain. Il faut voir et entendre 'Injun/Dallas', le décrire n’a aucun sens. Il joue sur la circulation des corps, l’illogisme des actions et une musique très rythmée, sans pour cela (bien qu’il n’y ait pas de scénario) laisser tout au hasard. Quelques jours avant la manifestation, Oldenburg réunit avec sa femme Pat, quelques amis performers. On échange des idées, on établit des dimensions de durée et d’espace, on bâtit le décor. Claes observe et compare les réactions et voit ce qu’il peut demander à chacun tout en laissant le maximum de liberté dans l’exécution. Le film de Roy Fridge reconstitue en 1971 l'action faite en 1962. Il est ce que l'historienne de l'art Kristine Stiles appelle une "commissure", à savoir un interface à même de faire revivre l'action : il capte et conserve ce qui - par définition même - est appelé à ne pas laisser de traces ou des traces qui ne sont que des approches fragmentaires ou mémorielles de l’événement.