Résumé
Freddy Tsimba a construit son œuvre en glanant les balles laissées par les guerres qui ont déchiré son pays, la République démocratique du Congo. Il a donné corps aux figures fantomatiques que ces armes ont décimées.
Avis
Après quelques images qui récapitulent la notoriété internationale de Freddy Tsimba, 'Mavambu !' s’ouvre sur une question : pourquoi n’est-il pas connu dans son pays ? Qu’est-il pour celles et ceux qui l’entourent ? "Un grand artiste, magicien, sorcier, fou" ? Un "ermite"... pour lui-même, en tous cas. Face caméra, sur fond noir, en plan rapproché, Freddy Tsimba se livre et se raconte, tranquillement, chronologiquement, dévidant peu à peu les fils qui ont tissé son œuvre. Sa voix glisse en off sur Kinshasa aujourd’hui, le saisissant dans son environnement, son quotidien, sa famille, son travail, ses gestes. Parfois un peu illustratif, ce procédé très simple semble faire surgir les images directement du récit intime de Freddy Tsimba, leur donnant parfois le statut de l’invocation. Et, se déploie peu à peu sa vision poétique à l’origine d' œuvres monumentales, faites de douilles de cartouches récoltées dans son pays, de bouts d’armes de guerre, de ferrailles mortelles. Sony Labou Tansi écrivait : "En Afrique, l’art commence partout et l’on ne sait jamais où il se termine." Tsimba en est un exemple parfait. Il a construit son œuvre en découvrant l’art de forger dans la rue, en y glanant sa matière, mais surtout en donnant corps, à travers des restes de guerre, aux figures désormais fantomatiques que ces armes ont décimées. "C’est la rue qui m’a donné les clés de cette œuvre, je n’ai fait que ramasser ce qui s’y trouvait." Simple et modeste comme l’artiste qu’il s’emploie à filmer, le film réussit à saisir la portée visionnaire et poétique de son regard, habité par la tragédie, hanté de fantômes aux bouches cousues qu’il fait vivre.