Cezanne

Un film de Sophie Bruneau (2021, 61′)

Sophie Bruneau, accom­pa­gnée à la camé­ra par la pho­to­graphe Marie-Françoise Plissart, s’est ins­tal­lée pour un temps dans l’a­te­lier de Cézanne dit ate­lier des Lauves. Cette bas­tide assez modeste située à Aix-en-Provence lui ser­vit d’atelier entre 1901 et 1906, c’est-à-dire la der­nière par­tie de sa vie. Cézanne tra­vaille tous les matins dans ce grand espace bai­gné de lumière et de silence, par­mi les objets qui lui sont chers. Trois êtres à pré­sent se sont fait les gar­diennes du lieu. Elles épous­settent, dés­in­fectent, accueillent et guident les visi­teurs et les visi­teuses… par­fois elles res­tent là, pré­sences tuté­laires et pai­sibles comme impré­gnées par l’atmosphère sen­sible qui se dégage du lieu. C’est que des fan­tômes rôdent et que l’invisible chu­chote entre ces murs. Comme dans un tableau avec des pommes qui ne sont pas à cro­quer mais qui nous englou­tissent, nous absorbent len­te­ment dans le silence de la matière et dans la force des choses, le film lui aus­si nous absorbe, nous fait entrer dans un état de contem­pla­tion muette où la lumière et les formes ont triomphé.

La Vénerie et le Centre du Film sur l’Art ont déci­dé de mettre à l’honneur des femmes artistes, devant et der­rière la camé­ra. Cinq réa­li­sa­trices talen­tueuses vont nous emme­ner à tra­vers leurs films docu­men­taires à la ren­contre d’artistes et de per­son­na­li­tés remar­quables. Les Mardis de l’Art vous invitent à entrer dans leur uni­vers. Leur objec­tif com­mun ? Changer notre regard sur le monde et sur l’art. Leurs armes ? Une camé­ra (Delphine et Carole, les insou­muses et Marceline, une femme, un siècle), l’humour (Les femmes pré­fèrent en rire), la méta­mor­phose (The Ballad of Genesis and Lady Jaye) et l’amour du beau (Cezanne).

Marceline, une femme, un siècle

Un film de Cordelia Dvoràk (2018, 58′)

“Rouquine, juive, gau­chère, étran­gère.” Ce por­trait cro­qué en vitesse de Marceline Rozenberg, c’est elle-même qui nous l’offre : Marceline n’a jamais eu besoin des autres pour se défi­nir ou pour trou­ver sa place dans le monde. Née de parents juifs polo­nais immi­grés en France, res­ca­pée des camps nazis, cama­rade de dépor­ta­tion de Simone Veil, com­pagne du cinéaste Joris Ivens, Marceline Rozenberg va deve­nir Marceline Loridan-Ivens, et res­ter toute sa vie une femme libre, enga­gée ain­si qu’une cinéaste pas­sion­née. Car ce n’est pas au départ par l’écriture ou la parole publique qu’elle va rompre le silence sur sa dépor­ta­tion, mais par l’intermédiaire du ciné­ma, et plus spé­cia­le­ment dans un docu­men­taire de ciné­ma-véri­té signé Jean Rouch et Edgar Morin inti­tu­lé ‘Chroniques d’un été’. Si ‘Marceline une femme un siècle’ est, bien enten­du, le por­trait d’une artiste et d’une témoin majeure du 20e siècle, il est aus­si un film sur le ciné­ma et la sur­vie grâce à cet art. Le récit, agré­men­té d’archives fil­mées excep­tion­nelles, de pho­to­gra­phies inédites et du témoi­gnage de ses proches se nour­rit sur­tout de l’éner­gie et de la verve de cette femme alors âgée de 90 ans qui n’a rien per­du de son imper­ti­nence pour par­ler d’histoire, de poli­tique ou d’art. Ses films sur l’in­dé­pen­dance algé­rienne, la lutte pour l’in­dé­pen­dance viet­na­mienne ou encore de la Révolution cultu­relle en Chine res­te­ront les témoi­gnages de sa vision du monde et de la liber­té. Marceline Loridan-Ivens est morte en 2018.

La Vénerie et le Centre du Film sur l’Art ont déci­dé de mettre à l’honneur des femmes artistes, devant et der­rière la camé­ra. Cinq réa­li­sa­trices talen­tueuses vont nous emme­ner à tra­vers leurs films docu­men­taires à la ren­contre d’artistes et de per­son­na­li­tés remar­quables. Les Mardis de l’Art vous invitent à entrer dans leur uni­vers. Leur objec­tif com­mun ? Changer notre regard sur le monde et sur l’art. Leurs armes ? Une camé­ra (Delphine et Carole, les insou­muses et Marceline, une femme, un siècle), l’humour (Les femmes pré­fèrent en rire), la méta­mor­phose (The Ballad of Genesis and Lady Jaye) et l’amour du beau (Cezanne).

Delphine et Carole, insoumuses

Un film de Callisto McNulty (2018, 68′)

Dans les années 1970, deux femmes, Delphine et Carole décident de col­la­bo­rer et de mili­ter ensemble. Leur arme ? Une camé­ra. Elles réa­lisent ensemble une séries de vidéos conçues comme des inter­ven­tions poli­tiques au ser­vice des luttes des femmes, de toutes les femmes, de celles que jamais on entend ou que jamais on écoute, qu’elles soient comé­diennes, pros­ti­tuées, ouvrières… On connaît Delphine Seyrig, actrice chez Truffaut, Duras et Akerman ; on connaît moins Carole Roussopoulos, vidéaste qui fut l’une des pre­mières à s’emparer de la vidéo comme outil d’émancipation et libé­ra­tion de la parole.
Delphine et Carole, insou­muses, réa­li­sé par la petite-fille de Carole Roussopoulos, est un film de mon­tage qui croise les films tour­nés par les deux réa­li­sa­trices, des entre­tiens de Carole et des images d’archive de Delphine (films, émis­sions, etc.) Portrait magni­fique d’une com­pli­ci­té au tra­vail, por­trait d’une époque d’initiatives esthé­tiques et poli­tiques foi­son­nantes, plus de qua­rante ans ont pas­sé et leur pen­sée reste encore aujourd’hui d’une moder­ni­té décon­cer­tante. Un film impor­tant qui incite à décou­vrir l’œuvre docu­men­taire de ces deux muses libres et magni­fi­que­ment désobéissantes.

La Vénerie et le Centre du Film sur l’Art ont déci­dé de mettre à l’honneur des femmes artistes, devant et der­rière la camé­ra. Cinq réa­li­sa­trices talen­tueuses vont nous emme­ner à tra­vers leurs films docu­men­taires à la ren­contre d’artistes et de per­son­na­li­tés remar­quables. Les Mardis de l’Art vous invitent à entrer dans leur uni­vers. Leur objec­tif com­mun ? Changer notre regard sur le monde et sur l’art. Leurs armes ? Une camé­ra (Delphine et Carole, les insou­muses et Marceline, une femme, un siècle), l’humour (Les femmes pré­fèrent en rire), la méta­mor­phose (The Ballad of Genesis and Lady Jaye) et l’amour du beau (Cezanne).

Shiro Takatani, entre nature et technologie

Un film de Giulio Boato et Enrico Pitozzi (2018, 52′)

Un mor­ceau de vio­lon­celle exé­cu­té au beau milieu d’un lac plon­gé dans le brouillard, c’est la manière dont le cinéaste Giulio Boato ouvre son film consa­cré au tra­vail de l’artiste japo­nais Shiro Takatani. Une plon­gée sen­so­rielle à la fois visuelle et audi­tive dans un ima­gi­naire volon­tai­re­ment mar­quant à l’i­mage des pro­po­si­tions de l’ar­tiste. Le docu­men­taire fait alter­ner des inter­views de Shiro Takatani et de ses proches (dont le célèbre com­po­si­teur Ryuichi Sakamoto), de com­mis­saires, des ins­tal­la­tions ou des extraits de ses spec­tacles et des plans sur les pay­sages japo­nais. Peu à peu, le film dévoile plus de trois décen­nies de créa­tion autour de la tech­no­lo­gie et de la nature, l’une ne ces­sant jamais d’éclairer l’autre. L’artiste révèle ses influences et ses pen­sées ain­si que les prin­cipes direc­teurs de son tra­vail qui échappent aux cadres impo­sés par l’un ou l’autre des champs artis­tiques qu’ils tra­versent. Il a d’ailleurs créé Dumb Type, dans les années 1980, une com­pa­gnie plu­ri­dis­ci­pli­naire unique qui ras­sem­blait des archi­tectes, des ingé­nieurs du son, des vidéastes, dan­seurs, dan­seuses, musi­ciens et musi­ciennes. À tra­vers ce tra­vail où les fron­tières entre le spec­tacle vivant, l’installation vidéo et les arts gra­phiques s’estompent, nous voya­geons des abysses au cos­mos, dans un uni­vers qui nous échappe mais pro­pose des formes inoubliables.

Still Life. Ron Mueck at work

Un film de Gautier Deblonde (2019, 52′)

Ce film est avant tout un film sur le temps, une immer­sion totale dans l’a­te­lier, le tra­vail et les gestes méti­cu­leux du sculp­teur hyper­réa­liste Ron Mueck. Durant deux ans, Gautier Deblonde a eu carte blanche pour fil­mer l’artiste lors de la réa­li­sa­tion de trois œuvres expo­sées à la Fondation Cartier pour l’art contem­po­rain, en 2013. Pouvoir péné­trer le sanc­tuaire d’un artiste répu­té secret, à l’i­mage de ses sculp­tures silen­cieuses, médi­ta­tives et mys­té­rieuses, cap­tive immé­dia­te­ment. Le voir au tra­vail impres­sionne. On y lit clai­re­ment son obses­sion pour le vrai et une approche sen­sible jusqu’à l’extrême des formes et des maté­riaux. En repous­sant les limites de la res­sem­blance, Ron Mueck invente des per­son­nages dont les expres­sions nous sont à la fois fami­lières et tota­le­ment étran­gères. Gautier Deblonde par­vient à main­te­nir notre atten­tion sans aucun mot. Son regard impose une atmo­sphère et ses cadrages, non sans humour, nous invite à par­ta­ger des sen­sa­tions presque phy­siques. Un film qui entre dans la plus grande inti­mi­té de la créa­tion et en res­ti­tue les choses les plus ténues.

Mitten

Un film d’Olivia Rochette et Gérard-Jan Claes (2019, 53′)

Devant l’instrument, se tient, de face ou de côté, le musi­cien Jean-Guihen Queyras qui inter­prète les six suites pour vio­lon­celle de Jean-Sébastien Bach, un som­met de l’histoire de la musique occi­den­tale. Trois dan­seurs et deux dan­seuses (dont Anne Teresa De Keersmaeker elle-même) se suc­cèdent sur le pla­teau et donnent vie à cette sublime par­ti­tion. Au sol, sont tra­cés des cercles, des lignes droites, des formes géo­mé­triques com­plexes et des spi­rales en cou­leur qui sont non seule­ment des marques pour les dan­seuses et dan­seurs mais qui suivent les lignes musi­cales. Cela montre de manière tan­gible toute l’architecture éla­bo­rée entre mou­ve­ment et musique. Pour preuve, ce début de film autour de la table, par­ti­tions en main, que le musi­cien décode avec la cho­ré­graphe et la deuxième dan­seuse, note après note, clé après clé, mesure après mesure et qu’Anne Teresa patiem­ment annote. Le tra­vail au cor­deau qui est à l’œuvre ici nous montre com­bien la géo­mé­trie tient une place pri­mor­diale et qu’il s’agit d’un véri­table tra­vail sur les pers­pec­tives, une minu­tieuse occu­pa­tion de l’espace. Pour autant, il ne s’agit pas d’illustrer la musique mais au contraire de la mon­trer sous toutes ses facettes, de l’éclairer par­fois, de la prendre à rebrousse-poil à d’autres, de la mettre au défi ou en pers­pec­tive ailleurs encore… Et c’est bien ce que par­viennent à éclai­rer de manière sai­sis­sante les deux cinéastes, l’étreinte fas­ci­nante et presque vivante entre musique et danse, la confron­ta­tion et la fusion réus­sie de la musique ancienne qui se conjugue avec la moder­ni­té de la danse et des dan­seuses et dan­seurs. Le duo Olivia Rochette et Gérard-Jan Claes, atten­tif et pré­sent à la fois aux gestes mais aus­si aux mots, trouve la dis­tance idéale pour nous faire entrer dans ce pro­ces­sus et rendre visible l’invisible. En met­tant en lumière ce tra­vail opi­niâtre et auda­cieux, les cinéastes nous montrent que la recherche de cette cho­ré­graphe est théo­rique sans être abs­traite, mathé­ma­tique en res­tant sen­suelle. Et l’on s’installe avec joie dans ce docu­men­taire qui pour­rait durer des heures tant on a de plai­sir à être avec elles et eux, à les voir cher­cher, se trom­per, recom­men­cer, dou­ter et confron­ter leurs ressentis…

Cobra

Un film de Ole Roos (1975 – 52’)

Un film de ren­contre avec quelques cobristes – Pierre Alechinsky, Constant, Corneille, Carl Pedersen – et struc­tu­ré autour de l’histoire du mou­ve­ment racon­tée par Christian Dotremont. Depuis le mani­feste du 8 novembre 1948 et pas­sant par la défi­ni­tion de l’esprit CoBrA, la vie du groupe, les ren­contres de Bregenrod, le scan­dale de l’exposition du Stedelijk. Des docu­ments, des pho­tos, des tableaux, des ate­liers mais sur­tout l’extraordinaire pré­sence de Christian Dotremont avec son dis­cours, son humour. Un moment d’anthologie lou­foque : le com­men­taire d’un livre de pré­his­toire, illus­tré pour les enfants, qui sert à décrire les grands moments du mou­ve­ment. Le film s’ouvre et se ferme sur les images du 10 rue de la Paille, lieu fon­da­teur main­te­nant com­plè­te­ment déla­bré, il res­pecte la chro­no­lo­gie, et se construit à base d’interviews qui sont main­te­nant deve­nues d’exceptionnels documents.

Alechinsky, l’œil du peintre

Un film de Robert Bober (1997 – 70’)

Au départ, une idée de cinéaste : deman­der à Pierre Alechinsky ce qu’il pense de la repro­duc­tion de ses tableaux cap­tés par une camé­ra de télé­vi­sion. Est-ce que les cou­leurs sont exactes et sinon com­ment arri­ver à une plus grande fidé­li­té ? Ce pos­tu­lat pure­ment tech­nique tourne court et c’est le peintre qui va entraî­ner le réa­li­sa­teur sur son ter­ri­toire et le faire entrer dans ses inter­ro­ga­tions. C’est là que le film devient pas­sion­nant, ouvert comme une grande conver­sa­tion. Pourquoi est-il pas­sé de la pein­ture ver­ti­cale où la toile est posée sur un che­va­let, à la ges­tuelle orien­tale où le papier est posé à même le sol ? Comment s’est faite sa décou­verte de l’acrylique avec l’œuvre char­nière ‘Central Park’ (1964) ? D’où est venue l’idée des “remarques mar­gi­nales” mises autour d’un motif cen­tral ? Que lui a appris la cal­li­gra­phie japo­naise ? Comment uti­lise-t-il les papiers anciens, lettres, cartes de géo­gra­phie, fac­tures du siècle pas­sé ? Le film s’a­chève sur les séquences fas­ci­nantes de l’élaboration d’une œuvre où l’on voit le peintre entrer en créa­tion, faire et expli­quer ses choix et ses gestes, com­men­ter son tra­vail. Cette struc­ture vivante où l’intervieweur n’est qu’un orien­teur donne à ce film une liber­té et une intel­li­gence qui gomment toute infor­ma­tion au pro­fit de la ren­contre : il s’a­git d’un por­trait juste.

Rêve Kakudji

Un film d’ Ilana Navaro (2018 – 52’)

Il est jeune, il est noir et il chante, la tête rem­plie de rêves. Il a quit­té son Congo natal pour venir étu­dier en Europe. Serge Kakudji n’est pas rap­peur, mais contre-ténor et si la cou­leur de sa peau est par­fois un han­di­cap dans le monde de l’opéra, la force de son rêve par­vien­dra peut-être à le trans­for­mer en atout.

https://www.lavenerie.be/programme/reve-kakudji‑2/
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